samedi 31 mars 2007

Le 5e Prix des Lecteurs du Télégramme # 3


"Le coeur de l'hiver." Dominic Cooper. Roman. Editions Métailié, 2006.
Traduit de l'écossais par Bernard Hoepffner.

Il existe en littérature un thème romanesque, celui du vieil homme confronté à une nature hostile, qui a donné lieu à de nombreux chefs d'oeuvre dont les plus célèbres sont, entre autres, « Le vieil homme et la mer » d'Hemingway, « le vieux qui lisait des romans d'amour » de Luis Sepulveda ou encore « Le jour avant le lendemain » de jorn Riel.

« Le coeur de l'hiver » de Dominic Cooper appartient lui aussi à ce genre littéraire et , à l'instar des exemples cités plus haut, est digne d'être classé en bonne place parmi ces excellents romans.

Le personnage central du récit, Alasdair, est un homme des highlands qui, depuis la mort de son père et le départ de son frère, vit seul et exploite la petite ferme familiale située sur la côte occidentale de l'Ecosse. Sur ces rivages battus par les vents de l'Atlantique, la vie est âpre et rude, et les quelques hommes qui n'ont pas abandonné le pays pour la sécurité des grandes villes, doivent se contenter d'une vie fruste et solitaire.
Alasdair partage son temps entre la pêche au homard, dont la vente lui permet de subvenir à ses besoins, et l'élevage de ses bêtes. Cet homme dont le physique peu avenant le fait considérer par les autres comme un simple d'esprit, mène sa vie solitaire avec bon sens et simplicité, en accord avec les rythmes de la nature et ses bêtes avec qui il entretient une relation empreinte de respect et de complicité.
Pour lui, la vie s'est toujours écoulée paisiblement, jusqu'au jour où un vient s'établir à proximité un personnage inquiétant qui, sans raisons aucune, voue une haine implacable à Alasdair. Cet homme, surnommé An Sionnach ( « le renard » en gaëlique) va tout faire pour nuire à Alasdair et pousser celui-ci dans ses derniers retranchements.

« Le coeur de l'hiver » est un récit superbe et tragique, un drame épique digne des sagas scandinaves du moyen-âge ( Dominic Cooper cite, en ouverture de son roman la Saga de Njall le Brûlé, une des plus belles et plus célèbres sagas islandaises), une sombre histoire de vengeance où deux hommes s'opposent au sein d'une nature sauvage, belle et violente.

Cette nature, omniprésente dans le roman, se voit magnifiée par l'écriture puissante et évocatrice de Dominic Cooper qui restitue talentueusement par la magie de sa prose la violence et le déchaînement des éléments qui s'abattent sur cette côte tourmentée qui résiste depuis des temps immémoriaux aux titanesques assauts de l'océan. Qu'on en juge par cet extrait :

« Les nuages remplissaient le ciel après s'être bousculés à l'horizon comme autant d'oiseaux apeurés fuyant un grand incendie. En dessous d'eux les rangées de vagues traversaient la mer sans répit, leur crête blanchie ici et là par un vent tourbillonnant à la surface, et lançaient leur puissance si longtemps retenue sur les rochers du rivage. Lorsque les vagues, poussées par le vent, approchaient de la côte, elles rencontraient les récifs et les talus, prenaient de la hauteur jusqu'à ce qu'il paraisse impossible qu'avec leur frange blanche bouclée elles puissent avancer d'un mètre encore sans culbuter la tête la première à leurs propres pieds. Et pourtant elles avançaient – elles couraient de l'avant comme des jongleurs, maintenant haut leur crête à la limite de la perte d'équilibre de sorte que leur élan prenait d'autant plus de puissance pendant les derniers mètres de leur parcours. Alors enfin elles atteignaient la côte et après un dernier effort elles se dressaient, restaient immobiles une seconde avant de se jeter sur la terre.
Elles explosaient de mille manières différentes – certaines, apparemment, avec hostilité, d'autres avec une haine orageuse, d'autres avec une délicate allégresse, d'autres encore avec soulagement – mais elles projetaient toutes d'immenses nappes d'écume et de lait salé sur les rochers noirs et les promontoires rocheux. Parfois ces vagues sauvages enveloppaient complètement les rochers d'un mélange explosif d'eau et d'air qui dissimulait brièvement toutes choses. A d'autres moments – lorsque une vague se brisait trop tôt – les eaux écumeuses se précipitaient sur les rochers les plus plats comme de jeune s agneaux fuyant par dessus un mur. Et alors des bras, des doigts, des ongles d'écume s'immisçaient dans les fentes et les crevasses, les plis, les tunnels et les grottes au point que la roche morose se retrouvait tout à coup animée d'une vie palpitante et sinueuse. Mais l'élan finissait par mourir, les eaux menaçantes étaient freinées, s'arrêtaient et commençaient à retomber, pour être aspirées et tirées en arrière jusque dans la gueule de la vague suivante. La côte tout entière, aussi loin que l'on pouvait voir, était frangée par cette toison bouillonnante. »

« Le coeur de l'hiver » est un roman aux accents épiques, magistralement mis en scène par la prose de Dominic Cooper, une ode à la nature sauvage, un chant de vie et de mort où souffle le vent du grand large. La violence des hommes, semblable en cela à celle de l'océan, s' y déchaîne sans prévenir et rejette, quand la colère s'est apaisée, les corps brisés de ses victimes. Ce roman, dont l'écriture, par sa puissance, rappelle celle de Hermann Melville, nous laisse, une fois la dernière page tournée, comme étourdis, sonnés, par le déferlement des vagues et les bourrasques de vent glacial sur la lande déserte. Un grand roman.
L'avis de Chatperlipopette et de Clarabel.

vendredi 30 mars 2007

Fait-d'Hiver


"Des anges dans la neige." Stewart O' Nan. Roman. Editions de l'Olivier, 1997.
Traduit de l' américain par Suzanne V. Mayoux.



Dans une petite ville sans histoires de Pennsylvanie, au cours de l'hiver 1974, Glenn Marchand abat son ex-femme, Annie. Que s'est-il passé ? Comment ce jeune couple en est-il arrivé à cette dramatique extrémité ?
Quinze ans plus tard, Arthur Parkinson, dont Annie fut la baby-sitter, revient sur cet évenement qui l'a marqué à tout jamais.
Alors que défilent ses souvenirs d 'adolescence, les circonstances et les causes de ce drame de la rupture se précisent peu à peu sous nos yeux en une lente progression vers l'inéluctable conclusion de cette tragédie.
Avec « Des anges dans la neige » Stewart O'Nan signait en 1994 son premier roman.
On y trouve déjà l' atmosphère et les thèmes rencontrés dans « Le pays des ténèbres » : une description âpre et sans concessions de la société américaine, les tourments d'une adolescence en perte de repères face à des adultes paumés et empêtrés dans leurs contradictions, le poids de l'absence d' êtres chers, disparus brutalement et à jamais, les non-dits et les dissenssions familiales.

Stewart O' Nan décrit d'une manière quasi-anthropologique l' Homo Americanus dans les rapports qu'il entretient avec la vie, la mort, les sentiments, l' environnement dans lequel il évolue : restaurants fast-food , centres commerciaux et quartiers résidentiels-dortoirs. Il nous décrit ces vies cabossées par le destin, ces existences vouées à d'éternelles frustrations et qui ne trouvent d'exutoire à celles-ci que dans la consommation à outrance où dans la destruction pulsionnelle des êtres qu'ils chérissent.

En quatrième de couverture de ce roman paru aux Editions de l'Olivier en 1997, l'éditeur cite un article de Raphaëlle Rérolle paru dans Le Monde : « A l'envers du rêve américain de conquête de l'espace, les personnages d'O'Nan sont perdus dans un pays trop grand qui ne contient pas de place pour eux. Leur cauchemar, d'une violence inouïe, parle des ombres tapies sous la surface ripolinée d'une société encline au fantasme d'innocence. »

Avec « Des anges dans la neige » Stewart O'Nan signe un roman effrayant et bouleversant dont on ne ressort pas indemne. Une tragédie de notre temps sur le thème de l'incommunicabilité qui hantera longtemps le lecteur.

N'oublions jamais...


Parce que voter c'est résister...






Les 22 avril et 06 mai, Votez.

A mon père ( 1922-1995 ) qui s'engagea dans la résistance en 1940, et pour qu'il n'ait pas risqué sa vie en vain.
A ceux qui sont morts pour nous.

jeudi 29 mars 2007

Miyazaki le Magicien


"Le Voyage de Chihiro." Un film de Hayao Miyazaki.



Je l'avais raté lors de sa sortie en salles et c'est seulement hier soir que pour la première fois je l'ai vu en DVD. J'en suis encore tout émerveillé. Décors somptueux et oniriques, personnages attachants , ambiance surréaliste et musique magnifique signée Joe Hisaishi. Un chef-d'oeuvre du magicien Hayao Miyazaki.


Inuit Nunat ( Le pays des Hommes )


"Arluk" Jorn Riel. Roman. Gaïa Editions, 1996.
Traduit du danois par Inès Jorgensen.



Jorn Riel, le chantre de la banquise, a fait du Groënland la terre d'élection de sa prose romanesque. Dans l'ensemble de son oeuvre transparaît la rencontre, parfois amicale, parfois violente, entre deux mondes différents, celui des européens d'une part, et celui des Inuits, chasseurs nomades originaires du grand Nord canadien qui essaimèrent peu à peu vers l'Est et le Groënland. A peu près à la même époque ( entre 1000 et 1500 ap. J.C.) les vikings et leurs descendants, pour la plupart originaires de Norvège s'installèrent le long des côtes et des fjords situés au sud de la « Terre Verte

Le roman de Jorn Riel se déroule au moment où les populations norvégiennes établies au Groënland sont peu à peu décimées par la peste, les changements climatiques, l'interruption des échanges avec leur patrie d'origine ainsi que les violentes escarmouches les opposant d'une part aux pirates et d'autre part aux Inuits.

C'est en cette période tourmentée que naît Arluk, chasseur Inuit et « Angagok » ( Chamane ) à qui il est prédit qu'il visitera toute la terre ( le Groënland. )

Jorn Riel nous raconte alors la vie et l'odyssée de ce grand chasseur, les moments de joie et les drames qu'il devra surmonter au cours de son errance dans les solitudes glacées. Arluk sera confronté à l'univers des « Kavdlunait » ( les européens) en la personne de Svava, ultime survivante d'une communauté norvégienne, qui deviendra sa deuxième épouse et donnera naissance à une fille aux cheveux blonds, Panikpak.

Le récit, dont la prose sans fioritures, semblable en cela à celle des sagas scandinaves, fait se succéder parties de chasses, légendes et mythes traditionnels Inuits, aventures de voyages, scènes intimistes et descriptions d'une nature sauvage et redoutable dont la beauté époustouflante transparaît à chaque page.

Le roman de Jorn Riel est une épopée mystique et sauvage où le devenir et les actions des hommes sont influencés par les vieux mythes fondateurs et le pouvoir des esprits tutélaires qui règnent sans partage sur les étendues glacées de l'arctique.

Dans la même veine, et à lire du même auteur :
" Le jour avant le lendemain."

mardi 27 mars 2007

Une tragédie arctique


"ATANARJUAT, la légende de l'homme rapide." Zacharias Kunuk, 2001



Parallèlement à ma lecture du moment ( « Arluk » de Jorn Riel ), nous avons vu hier soir "ATANARJUAT" , La légende de l'homme rapide » un étonnant et magnifique film se déroulant chez les Inuits du cercle polaire.


Servi par des images superbes et une musique envoûtante, ce film nous parle de vengeance, d'adultère et de meurtres commis au sein d'une communauté de chasseurs nomades. On retrouve ici tous les ingrédients qui, depuis la nuit des temps, ont inspiré tant de légendes, de romans et de tragédies dont l'universalité des thèmes ont transcendé les époques et les cultures.
Parce que leur petite communauté est née d'un meurtre commis vingt ans auparavant, le mal divise celle-ci en deux groupes qui, sous un calme apparent, se vouent une certaine hostilité. Deux frères, Amaqjuaq, l'homme-fort, et Atanarjuat, l'homme-rapide, vont, en défiant Oki, le fils vantard du chef du campement, se retrouver au sein de cette rivalité et faire éclater celle-ci au grand jour.


Polar et western ethnique, « Atanarjuat » est un film palpitant qui nous entraîne aux confins du monde, au sein d'une nature superbe et impitoyable, à la rencontre d'une culture et d'un peuple dont l'univers est aujourd'hui gravement menacé par le réchauffement climatique.
Une épopée sublime aux accents de tragédie antique.



« ATANARJUAT » a reçu la Camera d'Or lors du Festival de Cannes 2001.

Tatouages & Piercings


"Sous le règne de Bone." Russell Banks. Roman. Actes Sud, 1995.
Traduit de l'américain par Pierre Furlan.



"Bone", c'est le surnom que s'est donné Chappie, un adolescent de quatorze ans .
Avec sa crête à la mohawk et ses anneaux dans les oreilles et dans le nez, Bone tente d'échapper à la monotonie du quotidien en se défonçant à la bière et à la marijuana. L'école ne fait plus partie de ses préoccupations et il préfère passer son temps à traîner dans les galeries du centre commercial local. Lui et son copain Russ dealent de l'herbe afin d'assurer leur propre consommation de stupéfiants et n'hésitent pas, quand l'occasion s'en présente, à accomplir de petits larcins pour se faire un peu d'argent.
Côté famille, ce n'est pas rose non plus. Bone vit dans un mobil-home avec sa mère, divorcée, et son beau-père, un pervers alcoolique pour qui il éprouve une haine bien justifiée.
Un jour, alors qu'il se retrouve seul , cherchant dans le mobil-home quelque chose à subtiliser afin de le revendre pour s'acheter un peu d'herbe, Bone découvre deux petites mallettes dans la chambre de sa mère. En découvrant leur contenu, il pense avoir trouvé une solution à ses problèmes de ravitaillement. Mais ce qu'il ne sait pas encore, c'est qu' à partir de ce moment-là, sa vie va basculer.

« Sous le règne de Bone » nous invite à suivre l'itinéraire d'un jeune adolescent paumé dans l'Amérique de la fin du XXè siècle, un de ces « zonards » ou « routards » que l'on croise de plus en plus fréquemment, vivant de petites combines ou en faisant la manche dans les lieux fréquentés. A priori, le personnage de Bone n'a rien de charismatique: voleur, toxicomane, consommateur de bières, impulsif et sous-éduqué, il semble faire tout d'abord office de repoussoir. Mais, lorsqu'il se retrouvera livré à lui-même, on découvrira un autre Bone, un jeune homme qui, malgré ses défauts et ses excès ( mais qui n'en a pas ?) va faire preuve d'une grande sagacité et de grandes qualités de coeur .

A travers lui, qui au premier abord pourrait sembler être l'incarnation d'une certaine jeunesse délinquante et violente, se profile le portrait peu flatteur de la classe des adultes. Car ceux-ci, sous leur vernis de respectabilité, et en dépit de leurs discours moralisateurs, dissimulent habilement vices et perversions dont les conséquences s'avèrent bien plus nuisibles et pernicieuses que les égarements d'adolescents en rupture de ban.

« Sous le règne de Bone » est un roman d'initiation, le parcours d'un jeune homme d'aujourd'hui, issu d'un milieu défavorisé et qui tente comme tout un chacun d'accéder au bonheur et de trouver sa place dans une société qui s'évertue à broyer les corps et les âmes de ceux qui n'ont pas eu la chance de naître là où réussite sociale et épanouissement personnel vont de pair.
En quatrième de couverture de l'édition brochée d'Actes Sud parue en 1995, l'éditeur fait, à juste titre, de Bone le successeur de Huckleberry Finn, le héros de Mark Twain. J'y ai retrouvé aussi pour ma part des échos de Dickens dans l' innocence et la sagacité de son héros, dans la perversion des adultes et dans la lente progression, a travers maintes embûches, vers l'accomplissement de soi.

« Sous le règne de Bone » est un road-movie qui nous entraîne, de ces villes américaines désincarnées et dédiées au consumérisme, au soleil de la Jamaïque où, sous l'illusion paradisiaque de la vie facile des tropiques, se cachent, comme partout ailleurs, les démons du profit, de la violence et de la misère.

Roman initiatique, roman d'apprentissage, « Sous le règne de Bone » est une représentation de ce délicat et périlleux moment qu'est celui de l'entrée dans l'âge adulte, de l'abandon des illusions propres à l'adolescence, de la découverte et de l'acceptation de soi .

Avec ce livre, Russell Banks renoue et renouvelle le genre littéraire du jeune homme livré à lui-même et contraint d'affronter les pièges tendus par la société des adultes. Avec Bone, il nous offre un nouveau héros , comparable à ceux de Mark Twain et de Dickens, et nous invite, en dépoussiérant le mythe, à nous pencher non seulement sur l'attitude parfois déroutante des adolescents mais aussi sur nos propres travers d'adultes et sur la brutalité d'une société dont nous nous sommes faits les héritiers.

lundi 26 mars 2007

La Liste des 4

Suite à l'aimable invitation de Camille, je vais donc me plier à l'exercice de la liste des 4 :

- 4 livres de mon enfance :




  • "La Guerre du Feu" de J.H. Rosny-Ainé.


  • "Bilbo le Hobbit" de J.R.R. Tolkien.


  • "2O OOO Mille Lieues sous les Mers" de Jules Verne.


  • "Le petit Nicolas" de Sempé et Goscinny.


- 4 écrivains que je lirai et relirai encore :





  • Louis-Ferdinand Celine.


  • Mervyn Peake.


  • Gabriel Garcia-Marquez.


  • Umberto Eco.


- 4 auteurs que je n'achèterai ( ou n'emprunterai ) plus :





  • Marc Lévy.


  • Paulo Coelho.


  • Dan Brown.


  • Gladys Mitchell.


- 4 bouquins que j'emmènerai sur une île déserte :





  • "Le Quinconce" de Charles Palliser.


  • "Anthony Adverse" de Hervey Allen.


  • "A la recherche du temps perdu" de Marcel Proust.


  • "Don Quichotte" de Cervantès.


- 4 premiers bouquins de ma Pal :





  • "Arluk" de Jorn Riel.


  • "Des anges dans la neige" de Stewart O' Nan.


  • "Le Coeur de l'hiver." de Dominic Cooper.


  • "Les langues paternelles" de David Serge.


- 4 x 4 derniers mots d'un de mes livres préférés :





  • "Le présent c'est tout ce que nous avons. Le présent, encore et encore, et rien d'autre." (Timothy Findley : "Pilgrim." )




- 4 lecteurs ( lectrices ) dont j'aimerai connaître les 4 :





dimanche 25 mars 2007

Le 5e Prix des Lecteurs du Télégramme # 2


"Voyage aux pays du coton." Erik Orsenna. Essai. Fayard, 2006.


Egalement sous-titré « Petit précis de mondialisation », le livre d'Erik Orsenna nous entraîne à travers le monde à la découverte de la culture du coton, cette fibre végétale utilisée par l'homme depuis des millénaires, omniprésente dans tout ce qui relève du domaine du textile mais aussi et on le sait moins, dans notre alimentation, notre industrie chimique, et bientôt dans l'élaboration de nouvelles technologies.

Du Mali aux Etats-Unis et au Brésil, d'Egypte en Ouzbekistan puis en Chine et enfin en France pour achever ce tour du monde, Erik Orsenna nous fait tour à tour découvrir les différents modes de culture de cette plante si indispensable à l'activité humaine. Il nous décrit tout l'éventail de pratiques mises en oeuvre par ces pays pour relever le défi majeur qu' est celui de la mondialisation.

A armes inégales, les états producteurs de coton se défendent becs et ongles afin de conserver et élargir un monopole qui, pour certains, relève de la survie économique de leur nation. Mais face aux dures lois de l'économie de marché, que pèsent les communautés agricoles du Mali, sous équipées et encore attachées aux méthodes traditionnelles d'exploitation, face aux puissants lobbies agricoles américains avides de subventions. Que peuvent aussi ces producteurs américains face à la déferlante chinoise, forte de sa population pléthorique pourvoyeuse d'une main d'oeuvre sous-rémunérée et inépuisable ?


A travers l'exemple du coton, c'est à un état des lieux de l'économie mondiale que nous invite Erik Orsenna. En dissertant d'un domaine qui, pour certains pourrait paraître rédhibitoire ( et il l'est généralement pour moi ) c'est à dire l'économie, Erik Orsenna réussit la prouesse de nous passionner et de faire d'une enquête qui, écrite par tout autre que lui pourrait paraître sèche et assommante, un récit qui se dévore comme un roman, plein d'anecdotes enrichissantes, drôles et émouvantes.

Car Erik Orsenna, en écrivain talentueux, virtuose de la langue française, ne se contente pas de nous servir faits et chiffres pour étayer son travail, il nous dresse aussi , en plus de l'aspect économique, un tableau culturel, politique, social et écologique de chaque pays visité. On y rencontre à chaque page des personnages hors du commun, des paysages grandioses et lointains, des tranches de vie et des témoignages qui font de ce livre, à qui à été décerné le Prix du livre d'Economie 2007, un récit de voyages passionnant et enrichissant qui nous invite à réfléchir sur de nombreux problèmes du monde contemporain que sont les organismes génétiquement modifiés, la déforestation, l'exploitation intensive des richesses naturelles et humaines, l'ouverture aux autres où le repli sur soi , l'adaptation des systèmes politiques et sociaux face aux grands enjeux économiques planétaires ainsi, et surtout, que la place de l'être humain dans tout cela.


Débordant du cadre de l'étude de la culture du coton, Erik Orsenna, en habile pédagogue nous invite à un cours sur l'état du monde tel qu'il se présente actuellement, loin des préjugés et des idées reçues qui tendent à brouiller notre compréhension et à nous servir une version ethnocentrique des problèmes, des questionnements et des choix auxquels chaque continent, chaque état, aura à faire face dans un avenir qui ne se situe plus dans un hypothétique « demain » mais dans un futur qui est déjà la réalité d'aujourd'hui.

jeudi 22 mars 2007

Le 5e Prix des Lecteurs du Télégramme # 1


"Comme un film égyptien." Ron Barkaï. Roman. Fayard, 2006
Traduit de l'hébreu par Laurence Sendrowicz.

Comme un film, se déroule sous nos yeux la vie de Yossef Alfondari, juif séfarade égyptien bourré de préjugés sur les arabes, les communistes, les askhénazes, les chiens et les chats, et tous ceux qui, de près ou de loin, n'entrent pas dans le moule de ses convictions.
En un long monologue, il relate sa vie, son enfance au Caire, où pour échapper à la tyrannie de son père, il s'enfuit, d'abord à Alexandrie puis, quand est fondé l'état d'Israël, vers Jerusalem et enfin Tel-aviv.

Yossef Alfondari est un homme peu sympathique, il déteste sa femme et méprise ses enfants qu'il n'hésite pas à martyriser quand il ressent le besoin d'asseoir sur eux son autorité. Aigri, marqué à vie par son enfance misérable, Yossef reproduira envers sa famille la cruauté dont il a eu à souffrir de la part de son père.
Joueur invétéré, il dilapide sans remords l'argent du ménage en sacrifiant à sa passion du poker. Sioniste convaincu, il méprise et voue aux gémonies les arabes et tous ceux qui tentent de prendre leur défense.
Mais, et ce n'est pas la seule des contradictions qui habitent ce personnage, il voue une fervente admiration à la musique arabe et à ses grands interprètes que furent Oum Kalsoum, Fairouz, Abdelhalim Hafez et Farid El Atrash.
D'un naturel irascible, cet homme n'éprouve de plaisir qu'autour d'une table de poker, en compagnie de ses amis joueurs, où dans la dégustation matinale d'une tasse de café accompagnée d'une cigarette et en écoutant sur son tourne-disque une chanson d'Oum Kalsoum.

« Celui qui s'y entend vraiment en petits plaisirs quotidiens sait qu'on ne peut pleinement apprécier ces heures matinales sans musique. D'ailleurs chez moi, la musique compte parmi les ingrédients indispensables qui assurent un rythme soutenu à la circulation sanguine et une bonne préparation aux contraintes de la longue journée à venir. Dès l'instant où je sors du lit et jusqu'à ce que je quitte l'appartement, la platine de mon tourne-disque ne chôme pas. Ce qui est loin d'être aussi simple qu'on croit, car à chaque heure, à chaque moment d'une matinée, convient une musique particulière et il serait hors de question de se tromper. Après avoir posé mon finjan rempli d'eau sur le feu, je sors un disque d'Oum Kalsoum de sa pochette, l'essuie avec un foulard puis abaisse délicatement l'aiguille. Elle, la princesse du Nil, est la seule, l'unique capable d'envelopper le café d'une nuance à la fois triste et sucrée. Quand elle chante Feine al-ouyoun ( « Où sont les yeux. »), l'émotion me pince de l'intérieur et je sens les larmes monter, moi que rien d'autre ne fait pleurer... »

Car cet homme au coeur sec, brutal et intolérant, auteur d'un crime inavouable et resté impuni, nous décrit les petits moments de sa vie avec une justesse de ton et une sensualité débordante. Il nous entraîne dans un tourbillon de saveurs, d 'odeurs, de sensations et de musique qui nous transportent et nous immergent dans cet univers moyen-oriental où se croisent, s'affrontent et s'influencent cultures, idéologies politiques et dogmes religieux.

Avec pour toile de fond, l'histoire tourmentée de la naissance de l'état d'Israël, « Comme un film égyptien » est un ouvrage captivant et foisonnant où même les personnages secondaires mériteraient d'être le sujet d'un roman à part entière. La prose de Ron Barkaï, envoûtante et riche de sensations, nous entraîne dans un récit tissé de drames, d'humour et de sensualité.

En guise de conclusion, et pour coller au plus près de l'ambiance qui se dégage de ce très beau roman, une chanson de la légendaire Diva égyptienne, la très grande Oum Kalsoum qui interprète « El Atlal » en 1966 :



L'avis de Chatperlipopette

mercredi 21 mars 2007

Manger ou être mangé ?


"L'Histoire de Pi." Yann Martel. Roman. Denoël, 2003
Traduit de l'anglais (Canada) par Emile et Nicole Martel.



Comment réussir, après un naufrage, à survivre huit mois en plein Océan Pacifique? Comment réussir à partager l'espace restreint d'une chaloupe quand on se voit contraint de cohabiter sur celle-ci avec un zèbre, un orang-outan, une hyène et un tigre du Bengale? C'est l'incroyable aventure que va vivre « Piscine Molitor » Patel, fils du directeur d'un zoo de Pondichery.
Lorsque la situation politique indienne les contraint à émigrer vers le Canada, la famille Patel s'embarque sur un cargo japonais avec dans les soutes les animaux de la ménagerie dont ils n'ont pas pu se séparer avant leur départ.

Mais le navire fait naufrage en pleine mer et Pi , seul rescapé, va devoir partager le canot de sauvetage avec quelques animaux féroces et encombrants. Pendant huit mois, il devra affronter les éléments et éviter de servir de repas à ses compagnons d'infortune.

Muni d'un nécessaire de survie, il devra déployer des trésors d'ingéniosité pour se nourrir, s'abreuver et surtout satisfaire l' insatiable appétit de ses comparses.

Fort de ses connaissances en psychologie animale et avec l'aide de sa foi en Dieu, Pi, qui est conjointement de confession hindouiste, musulmane et chrétienne va devoir tenter d'échapper aux dures lois de la sélection naturelle.

Mêlant habilement roman d'aventures et considérations philosophiques, « L'Histoire de Pi » est un conte aux résonnances métaphysiques, une fable moderne qui par certains aspects rappelle le mythe biblique du Déluge ainsi que les grands thèmes romanesques du naufrage et de la survie dans des conditions extrêmes telles que décrits dans « Robinson Crusoë » de Defoe ou « L'île mystérieuse » de Jules Verne.

Ce roman, qui oscille entre humour et tragédie, entre fantaisie et manuel pratique de survie en haute mer, est passionnant de bout en bout. L'écriture de Yann Martel nous emmène très loin, dès les premières pages et l'on se sent très vite entraîné dans un récit plein de rebondissements et de situations cocasses ou angoissantes.

Quant au dénouement du récit, il s'avère surprenant et ne peut qu'inciter à reprendre le livre à la première page afin de le relire et d'y découvrir, peut-être, le petit détail subtil qui aurait échappé et qui permettrait de découvrir ce qui s'est réellement passé au cours de ces huit mois d'errance en plein océan.


Roman d'aventures et de réflexion métaphysique, « L'Histoire de Pi » offre un excellent moment de détente et de méditation qui entraînera le lecteur dans une odyssée aux accents philosophiques, une aventure haletante où l'imprévu se cache derrière chaque page que l'on tourne.

mardi 20 mars 2007

Le 5e Prix des Lecteurs du Télégramme













Je me lance !


Le Prix des lecteurs du Télégramme est ouvert et je viens d'envoyer mon inscription.
Au programme, 1o romans sont à lire. Il faudra ensuite voter par courrier et le 8 Juin le prix sera attribué au roman qui aura obtenu le plus grand nombre de voix. Par tirage au sort, trente membres du jury se verront décerner un Chèque-Lire d'une valeur de 15€ chaque mois pendant un an. Tentant non ? En tout cas, moi j'ai craqué et j'ai commencé dés aujourd'hui avec "Comme un film égyptien."

Ci-dessous les romans en compétition :

vendredi 16 mars 2007

Le Printemps des Poètes






L'homme et la mer



Homme libre, toujours tu chériras la mer!

La mer est ton miroir, tu contemples ton âme

Dans le déroulement infini de sa lame

Et ton esprit n'est pas un gouffre moins amer.




Tu te plais à plonger au sein de ton image;

Tu l'embrasses des yeux et des bras, et ton coeur

Se distrait quelquefois de sa propre rumeur

Au bruit de cette plainte indomptable et sauvage.




Vous êtes tous les deux ténébreux et discrets;

Homme, nul n'a sondé le fond de tes abîmes;

O mer, nul ne connaît tes richesses intimes,

Tant vous êtes jaloux de garder vos secrets!




Et cependant voilà des siècles innombrables

Que vous vous combattez sans pitié ni remords,

Tellement vous aimez le carnage et la mort,

O lutteurs éternels, O frères implacables!



Charles Baudelaire (1821- 1867)


jeudi 15 mars 2007

"Racailles & Sauvageons"


"La vie de ma mère ! " Thierry Jonquet. Roman. Gallimard, 1994.



Thierry Jonquet, avec« La vie de ma mère! » a voulu faire un roman sur un gamin de banlieue, une de ces « racailles »( Nicolas Sarkozy) de la petite ceinture, un de ces « sauvageons » ( Jean-Pierre Chevenement) dont les médias et les politiques aiment à évoquer les errances et les débordements afin d'acquérir des parts d'Audimat ou des électeurs.
Que politiciens et journalistes s'adonnent à ces pratiques démagogiques il n'y a là rien de surprenant. Par contre, quand un écrivain s'essaie à évoquer le « problème des banlieues » on est en droit de se demander si lui aussi n'est pas en train de surfer sur la vague des sujets de société qui fâchent et qui n'apportent, en fin de compte, de bénéfices qu'aux susnommés qui exploitent faits divers et violence sociale dans le seul but d'en tirer des avantages personnels.
Avec « La vie de ma mère! » , Thierry Jonquet serait-il lui aussi tombé dans le piège de la démagogie et de la caricature en mettant en scène un jeune ado des faubourgs parisiens qui, en un monologue d'environ 140 pages, nous raconte sa vie et ses tribulations, ses démélés avec l'école et la police, les petits larcins et les incivilités ordinaires, la vie des cités avec ses lois et ses combines, les grand-frères qui tournent toxicomanes ou intégristes musulmans ? En fait, non, car comme me l'a justement fait remarquer Gachucha, ce livre, paru en 1994, a été écrit avant que les banlieues ne deviennent un enjeu politique et sociétal majeur.
Ce livre peut s'aborder de deux manières: la première consiste à lire « La vie de ma mère! » comme un roman qui témoignerait d'un fait de société devenu incontournable depuis les émeutes de l'automne 2005, du portrait d'une jeunesse en dérive et sans repères qui ne trouve d'exutoires que dans la violence et la consommation à outrance. Mais le hic, c'est que Thierry Jonquet en fait des caisses, et l'on croule rapidement sous une avalanche de clichés qui ont pour résultat de faire perdre toute crédibilité au récit.
La seconde manière d'appréhender ce roman, c'est de l'aborder comme une parodie humoristique du comportement des jeunes de banlieue. En cela je tire mon chapeau à Thierry Jonquet qui réussit avec brio à restituer le langage et les expressions usitées dans tous les halls d'immeubles de France et de Navarre. J'émettrai cependant une réserve sur le terme « From » que Thierry Jonquet définit comme une abréviation de fromage blanc, destinée à désigner tout individu à peau blanche. Si cette expression existe, elle ne doit être d'usage que dans les quartiers d'Auteuil, Neuilly et Passy où les jeunes « fils à papa » essaient de se la jouer « Caillera .» Les termes « Cefrans », « Gaoulis » ou « Toubabs » sont, eux, beaucoup plus authentiques et Thierry Jonquet aurait pu éviter, avec « From » une erreur de terminologie « racaillesque. » Mais peut-être que ce roman, qui a maintenant treize ans d'existence a tout simplement vieilli.

En conclusion, pour ceux et celles qui voudraient lire un vrai roman sur la vie dans les banlieues, je conseillerai plutôt « Kiffe kiffe demain » de Faïza Guène qui décrit avec nuances et loin des clichés habituels la vie quotidienne des habitants des cités qui ne sont pas nécessairement les délinquants que l'on voudrait nous faire croire.
« La vie de ma mère! » mérite d'être lu, certes, mais au deuxième degré, comme une parodie, un exercice de style humoristique comme Goscinny le fit en son temps avec « Le petit Nicolas » ( qu'il ne faut pas confondre avec le démagogue au Karcher et aux talonnettes...) ou bien comme Elie Semoun dans cette petite annonce :








« La vie de ma mère! » a également été adapté en bande-dessinée par Chauzy aux éditions Casterman.

mercredi 14 mars 2007

Lost in Space

"Le Cycle de Tschaï." Jack Vance. Roman. Editions J'AI LU, 1999.
Traduit de l' américain par Michel Deutsch.





Parce qu'il à reçu un appel de détresse provenant de l'énigmatique planète Tschaï, le vaisseau spatial Explorator IV a franchi douze années-lumières. Arrivé à destination, le vaisseau est détruit par une attaque soudaine et inattendue. Le seul survivant, Adam Reith, s'écrase sur la surface de cette planète inconnue. Quelle n'est pas sa surprise quand il rencontre sur ce monde d'autres êtres humains vivant en tribus nomades et primitives. Capturé et asservi par les hommes-emblèmes, il assistera à leurs étranges coutumes et s'enfuira en compagnie d'un adolescent, Traz Onmale, avec qui il parcourra les continents de Tschaï dans le but de trouver le moyen de retourner vers la Terre.
Au cours de leur périple, ils seront confrontés aux différentes races qui vivent à la surface de Tschaï : des êtres humains bien sûr, mais aussi des extra-terrestres dont les Chaschs, les Wankhs, les Dirdirs et les Pnumes.
Adam Reith, accompagné de Traz Onmale et d'Anacho, l'Homme-Dirdir, vivront maintes aventures au sein d'un monde étrange, chatoyant et redoutable.
Jack Vance, qui avec « Le Cycle de Tschaï » signe un classique de la Science-Fiction, nous entraîne à la découverte d'un monde sorti tout droit de son imagination, avec ses différentes races de belligérants, sa faune et sa flore, ses coutumes et ses rites étranges, ses religions et ses modèles sociaux, sa géographie et ses mythes fondateurs, etc... qui font de ces quatre romans une grande histoire d'aventures pleine de rebondissements et d'originalité.
Le seul reproche que je pourrais faire à cette oeuvre, et qui est sûrement la conséquence de l'époque où il a été écrit ( en pleine Guerre Froide), c'est la condescendance dont use le personnage principal (ce n'est pas précisé, mais il a tout de l'américain) envers les différents habitants de Tschaï, considérés, malgré leurs avancées technologiques, comme barbares et superstitieux, et que, fort de ses convictions, il s'acharne à convertir à sa vision des choses. En cela, on peut facilement s'apercevoir que, au vu de certains évenements de l'actualité contemporaine, les choses n'ont guère changé outre-atlantique et que , forts de leur bon droit et de leur prétendue supériorité, nos amis américains ont encore du mal à accepter ce qui ne s'apparente pas à leur modèle de vie.
Cela mis à part, « Le Cycle de Tschaï » est un roman de science-fiction agréable à découvrir,l'occasion d' un bon moment de détente à la découverte d'un monde étrange et fascinant.
A noter la très belle adaptation de ce cycle en bande-dessinée, éditée chez Delcourt et réalisée par Li-An, Jean-David Morvan et Scarlett, dont on peut voir quelques planches et illustrations ici.



"Le monde est fait pour aboutir à un beau livre."
(Stéphane Mallarmé)

mardi 13 mars 2007


Tel est pris...


"Le jardin du Bossu." Franz Bartelt. Roman. Gallimard, 2004.



« Il était là, le con ! Rond comme un bidon. Entouré d'une flopée d'ivrognes encore plus saouls que lui. Je ne l'avais jamais vu en ville. J'ai demandé au Gus qui c'était. Il n'en savait rien. J'ai recommandé une bière. Le type se vantait. Il ne parlait que de son pognon. Il en avait, puisqu'il payait les tournées en sortant de sa poche des poignées de billets. Il refusait la monnaie. Il s'y croyait. Le con. Ah, le con ! Le Gus m'a dit qu'il était déjà saoul en arrivant. Il avait touché la paie ou quoi ? Il buvait du blanc limé. De temps en temps, il se levait et chantait une connerie. Il y a connerie et connerie. Les siennes, c'était des conneries de l'ancien temps. On n'y comprenait rien. Des histoires de drap du dessous, que c'est celui qui prend tout. Qu'est-ce que ça voulait dire ? Il retombait sur sa chaise, comme un sac. Il se remettait à parler de son pognon. Il en avait des tas. Stocké dans le tiroir de la salle à manger. Tout en liquide.- T'as pas peur de te faire attaquer ? A demandé un des gars. »


C'est ainsi que commence « Le jardin du Bossu » , un petit bijou de polar signé Franz Bartelt.
Le narrateur, qui est aussi le personnage principal de ce roman, en tentant de satisfaire l'esprit de lucre de sa compagne, va mettre le doigt dans un engrenage qui pourrait lui coûter la vie. Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'au fil des pages ses mésaventures n'engendrent pas la monotonie. On y trouvera une maison dont la cave renferme de lourds secrets, une ancienne speakerine, un virtuose du télé-achat, des amateurs de bière et d'alexandrins, de sodomie et de la « Touche Onassis » ainsi que bien d'autres choses encore.

Franz Bartelt, avec le « Jardin du Bossu » nous entraîne dans une ville de province qui pourrait se situer dans sa région d'origine, les Ardennes, peut-être à Charleville-Mézières, afin de nous présenter des personnages atypiques dissimulés sous le vernis de la banalité. Le personnage du narrateur est, à lui seul, tout un programme, loser et chômeur, amateur de combines et de petits larcins qui lui permettent d'améliorer l'ordinaire et de satisfaire les desiderata de sa compagne, il porte également sur la société un regard lucide et railleur qu'il exprime avec une gouaille et une fraîcheur hilarantes : « J'ai lu des livres sur la révolution, sur les émeutes. Du livre de gauche, de la dialectique. Limite communiste. Ah oui, j'aurais pu tourner enragé ! Mais le communiste, il réclame trop fort le plein emploi, du travail pour tous. Il croit qu'on est tous bâtis de la même manière, qu'on rêve tous de trimer à l'usine, de crever à cinquante ans après avoir engraissé les patrons. Le communiste, il a le sentiment de bien faire. Ce qu'il cherche, c'est le bonheur de tous. Je le reconnais. Mais s'il met tout le monde à l'usine, forcément qu'il fera des malheureux. Il y a un tas de types comme moi qui se trouvent très contents de ne pas travailler. Du moins de ne pas travailler à la chaîne ou à l'ébarbage ou à monter des parpaings. On en meurt plus facilement que de ne rien faire.
Moi je travaille, à ma façon. Je refuse seulement qu'on m'exploite. Quand je pique quelque chose dans un magasin, je prends mes risques, comme le couvreur qui grimpe sur un toit. Je peux tomber. Mais ça sera toujours de moins haut que le couvreur. Quand je tombe, moi je tombe sur un flic. Du rembourré, donc. En province, le flic à de l'éducation. Si on est bon joueur, il est bon prince. Je ne me plains pas de leurs manières. On a toujours eu d'excellents rapports. Meilleurs qu'avec les détenus, en prison. »


« Le jardin du Bossu » est un polar jubilatoire et décapant. A lire ce roman de Franz Bartelt, on se croirait dans un film de Bertrand Blier dialogué par Michel Audiard. Je ne résiste donc pas, pour rester dans l'ambiance, et en guise de conclusion, d'ajouter la scène d'introduction de « Buffet froid. »
Si vous avez aimé ce film, lisez donc « Le jardin du Bossu. »

vendredi 9 mars 2007

Une grande claque aux idées reçues


"L'élégance du hérisson." Muriel Barbery. Roman. Gallimard, 2006



Après tout ce qui a été dit sur ce roman, je ne sais quoi ajouter. Que dire, si ce n'est que ce livre a fait l'unanimité parmi les lecteurs qui ne cessent, à juste titre, de l'encenser; si ce n'est que le roman de Muriel Barbery est un petit chef-d'oeuvre qui se déguste entre rires et larmes, un hymne à la culture et à la tolérance, une fable érudite, cocasse et pleine de tendresse, un conte de fées moderne, subtil et sensible.
Bref, je pourrais continuer longtemps comme cela à jouer de superlatifs pour dire à quel point ce livre m'a emballé, touché et ému.
Ce roman qui, à première vue, pourrait passer pour une goutte d'eau dans l'océan des sorties littéraires, renferme, à l'instar de Renée, le personnage principal, une richesse insoupçonnée, un petit bijou d'écriture qui, sans prétention aucune, nous donne ici une formidable leçon de vie.
Conte moderne ou roman philosophique, c'est selon, et chacun y verra ce qu'il voudra.
« L'élégance du hérisson » nous fait pénétrer dans l'intimité de deux personnages qui partagent la même adresse mais qu' à priori, tout sépare.
Tout d'abord, il y a Renée, concierge d'un immeuble cossu situé Rue de Grenelle, la cinquantaine et dotée d'un physique peu avenant. Sous des dehors disgrâcieux, cette femme vit en fait une double vie : pour les habitants, elle n'est qu'une sorte de souillon destinée à astiquer les rampes d'escalier et à sortir les poubelles. Mais en fait, une fois la porte de sa loge refermée, Renée s'avère être une brillante intellectuelle. Dotée d'une impressionnante culture générale, les domaines de la philosophie,de la littérature,de la peinture et de la musique sont sa bouffée d'oxygène, son jardin secret, sa bulle qu'elle préserve contre vents et marées et surtout contre le regard des autres.
Ensuite, il y a Paloma, douze ans, qui vit dans les étages supérieurs et dont le père est un ancien ministre. Paloma porte sur son entourage un regard empreint de lucidité et d'ironie. D'une intelligence peu commune, elle a décidé que, face à l'inanité du monde des adultes et afin de ne pas devenir comme eux, elle se suicidera le jour de ses treize ans. En attendant la date fatidique, elle rédige ses pensées et ses considérations sur le monde qui l'entoure.

Ces deux personnages que l'âge, l'éducation et la classe sociale séparent, finiront un jour par se rencontrer grâce au caractère génialement intuitif d'un nouveau venu dans l'immeuble, Mr. Ozu.
Mais je n'en dirai pas plus concernant le déroulement de cette histoire au cas où ces lignes tomberaient sous les yeux d'une personne qui n'a pas encore tenu dans ses mains cet admirable roman.
« L'élégance du hérisson » fait partie de ces romans qui à peine refermés, donnent envie de les réouvrir à la première page afin de s'y replonger pour saisir un détail qui nous aurait échappé, une phrase dont on aurait pas tout à fait apprécié la tournure et le sens.
Ecrit de main de maître et faisant preuve d'une parfaite maîtrise de la langue française, le roman de Muriel Barbery est, en plus d'une version moderne et philosophique du conte de Cendrillon, une satire brillante et acérée des classes supérieures et de leur rapport à la culture. Tordant le cou à nombre d'idées reçues, Muriel barbery nous démontre que, ne leur déplaise, la culture n'est ni l'apanage, ni le privilège des nantis, et que l'étroitesse d'esprit ne se trouve pas forcément là où ils penseraient qu'elle soit,c'est à dire au sein des classes laborieuses. Ce constat fait de ce roman une oeuvre jubilatoire, un jeu de massacre où l'on se gausse de ces bourgeois suffisants et prétentieux, ainsi que de leurs enfants qui, en dehors de leurs études universitaires, se conduisent dans la vie comme de parfaits crétins, formatés comme leurs parents à manier le mépris et la condescendance envers ceux qu'ils considèrent comme leurs inférieurs. Non, décidément, la culture n'est pas proportionnelle à l'importance du compte en banque.
Mais « L'élégance du hérisson » c'est aussi et surtout, un hommage à l'art et aux artistes, peintres, musiciens et auteurs qui, de par leur travail, contribuent à rendre la vie plus belle et à rendre plus supportables l'adversité et les injures de l'existence. C'est également l'occasion de souligner et d'apprécier ces moments de magie et d'harmonie qui parsèment chaque jour de nos existences : l'éclosion d'une fleur de camélia, le plaisir d'une tasse de thé, le ronronnement d'un chat que l'on caresse...
Poétique et sensuel, drôle et tragique, émouvant et jubilatoire, c'est tout cela « L'élégance du hérisson » ... et plus encore. Un roman magique qui, pour moi, restera un grand souvenir de lecture.
A propos de ce roman, lire aussi l'avis de Cuné, Lily, et Chaperlipopette

mercredi 7 mars 2007

Mourir à 17 ans


"Le Pays des Ténèbres" Stewart O' Nan. Roman. Editions de l'Olivier, 2006.
Traduit de l'américain par Nicolas Richard.

Le dernier roman traduit en français de Stewart O'Nan nous entraîne dans une petite ville du Connecticut au moment des fêtes d'Halloween. Un an plus tôt,alors qu'ils fonçaient en voiture sur une petite route forestière, cinq adolescents en virée ont été victimes d'un accident qui a coûté la vie à trois d'entre eux. Les deux rescapés, Tim et Kyle, après ce drame, ne sont plus que l'ombre d'eux-mêmes.
Tim, qui a perdu dans l'accident sa petite amie Danielle, s'est muré dans son chagrin et n'arrive pas à faire le deuil de ses amis au point de souhaiter les rejoindre dans la mort.
Kyle, quant à lui, après un coma prolongé, se retrouve défiguré et diminué, doté des capacités intellectuelles d'un enfant de cinq ans.
En voix off, tout au long du récit, ce sont les âmes des trois jeunes défunts, Danielle,Toe et Marco qui font office de narrateurs. Dotés du don d'ubiquité des esprits, ils se déplacent où ils le veulent et s 'introduisent n'importe où afin d'observer et de discuter, parfois avec un humour potache, le comportement des vivants qui, de près ou de loin, ont joué un rôle dans leur existence ante-mortem.
A travers eux, l' on assiste ainsi aux comportements et cogitations de tous ceux qui ont eu à subir de plein fouet les conséquences de cette tragédie.
Ce sont tout d'abord les parents, enfermés dans leur désarroi face à la disparition de leurs enfants, condamnés à ressentir éternellement la cruelle absence de leurs rejetons et accomplissant les actes de la vie quotidienne comme des automates privés de sens.
Ce sont les parents de Kyle, dont la vie, face au handicap de leur fils, ne sera plus jamais la même.
Le père, tout d'abord, qui se refuse à accepter cette situation et fuit celle-ci en se réfugiant dans son activité professionnelle et en adoptant face à sa femme et son fils une attitude faite de faux-fuyants et de non-dits.
La mère de Kyle, quant à elle, se dévoue corps et âme à l'entretien de son fils qu'elle doit assister perpetuellement comme un petit enfant, partagée entre l'amour qu'elle porte à ce fils qu'elle ne reconnaît plus, et l'idée que sa mort, finalement, aurait été préférable à cette vie diminuée.
Il y a les copains, Greg et Travis qui n'acceptent pas cette disparition brutale et traînent leur spleen entre bière et fumette.
Il y a aussi l'agent de police Brooks qui s'est retrouvé le premier sur les lieux de l'accident, et qui depuis n'est plus le même homme, obsédé par les images de ce drame. En ce jour d'Halloween, triste premier anniversaire de l'accident, il n'a qu'une seule chose en tête, surveiller Tim, l'inconsolable rescapé, qu'il soupçonne de commémorer cet évenement en accomplissant un acte irréparable.
« Le pays des ténèbres » que nous décrit Stewart O'Nan, avant les limbes où évoluent les esprits des trois jeunes victimes qui nous accompagnent tout au long du récit, c'est surtout cette Amérique des lotissements pavillonnaires sans âme et aux rues désertes, délimités par ces zones commerciales sans fin et toutes semblables, où s'alignent restaurants fast-food et chaînes de supermarchés, cette Amérique de la Middle Class qui passe le plus clair de son temps entre le travail, la tondeuse à gazon et le plateau télé. Cette Amérique qui n'a que l'ennui, la bière et le Hard Rock à offrir en exutoire à sa jeunesse déboussolée.
Ce roman, en plus d'être le portrait d'un certain aspect de la société américaine se veut aussi un hommage à la Pop Culture actuelle à travers les références musicales évoquées par les adolescents qui nous accompagnent tout au long de ce récit. Hommage aussi aux films d'horreur de série B dont chaque chapitre porte le titre, ainsi qu'aux grands maîtres du fantastique comme Stephen King et Ray Bradbury à qui ce roman est dédié.
« Le pays des ténèbres » est un roman « coup de poing » , un récit bouleversant, émouvant et dérangeant, une description acérée de la classe moyenne américaine et un réquisitoire contre la société de consommation à outrance, un roman sur le deuil, le chagrin et l'absence, sur l'adolescence et ses démons, sur l'infortune d'être jeune dans un pays d'adultes « morts-vivants. »
Il faut lire « Le pays des ténèbres. »

dimanche 4 mars 2007

"Une bibliothèque, c'est un des plus beaux paysages du monde."
( Jacques Sternberg)

samedi 3 mars 2007

Le Compas et la Boussole


"Les Arpenteurs du Monde" Daniel Kehlmann. Roman. Actes Sud, 2006
Traduit de l'allemand par Juliette Aubert.



En 1828, Alexander Von Humboldt organise à Berlin une réunion de l'Association Scientifique. Sont conviés à cet évenement environ six cent savants des plus renommés.
C'est l'occasion qu'a choisi Daniel Kehlmann pour nous dresser le portrait de deux des plus éminents chercheurs allemands du XIXè siècle, à savoir Humboldt, le célèbre explorateur (1769-1859), et Carl Friedrich Gauss (1777-1855), astronome et mathématicien.
Le récit nous fait suivre alternativement au fil des chapitres les destins parallèles et dissemblables de ces deux hommes qui n'ont en commun qu'une passion effrenée : la découverte scientifique.
Cette passion entraînera Humboldt des rives de l'Orénoque aux toundras sibériennes en passant par le Mexique et les tout nouveaux Etats-Unis. En compagnie de son collaborateur et ami, le botaniste français Aimé Bonpland, il traversera la forêt vierge, assailli par les fièvres, les moustiques et les animaux sauvages, à la recherche d'un canal reliant l'Orénoque à l'Amazone.Il fera l'ascension, dans les Andes, du Chimborazo, considéré à l'époque comme le plus haut sommet du monde,il visitera au Mexique les ruines imposantes de Teotihuacan et rendra visite à Philadelphie au président des Etats-Unis, Thomas Jefferson.
Des forêts équatoriales sud-américaines aux portes de la Chine, Humboldt ne cessera d'herboriser, de cartographier, de recueillir des specimens d'espèces animales locales, d'explorer grottes et mines à la recherche de minéraux en une quête compulsive qui lui fera mesurer l'élévation de la moindre colline et collationner des échantillons de toutes sortes.
Gauss, quant à lui,fera preuve dès sa plus tendre enfance d'un génie précoce pour les mathématiques. Contrairement à Humboldt qui était issu de la noblesse, Gauss est d'origine modeste,son père est jardinier.
Très vite, son génie le fera remarquer et il pourra ainsi accomplir des études à Göttingen. Auteur en 1801 des « Disquisitiones Arithmeticae », il ne cessera d'étudier et d'émettre de nouveaux et nombreux théorèmes mathématiques. Parallèlement, il étudiera les lois de probabilités et l'astronomie qui lui permettront de calculer avec une rigoureuse exactitude l'orbite de la planète Cerès.
Obsédé par les mathématiques , Gauss n'hésitera pas à interrompre son devoir conjugal lors de sa nuit de noces afin de noter une formule.
Contrairement à Humboldt, Gauss est un irascible casanier et répondre à l'invitation de l'explorateur en se rendant pour cela à Berlin ne sera pas une mince affaire pour le mathématicien.Accompagné de son fils Eugène, qu'il méprise car celui-ci s'adonne à la poésie, il entreprendra tant bien que mal le voyage afin de rencontrer son hôte.
Cette rencontre sera pour les deux savants l'occasion de faire le bilan de leur vie. L'un aura fait le choix de la solitude et des voyages afin de combler un désert affectif , l'autre aura choisi une vie familiale statique ainsi qu'une nombreuse descendance. Lequel des deux aura le mieux rempli sa vie et comblé son existence?
Et cet amour fanatique de la science ne serait-il qu'une manifestation dérisoire de ce vide que tous deux ont cherché à combler face à la révélation d'un univers incommensurable qui démontre l'inanité des destinées humaines.

Réflexion sur le destin, « Les Arpenteurs du Monde » est aussi l'occasion pour Daniel Kehlmann de décrire la vieille et caricaturale opposition entre scientifiques et artistes à travers le personnage du fils de Gauss, Eugène, jeune homme sensible et féru de poésie, confronté à l'intolérance des deux savants face à tout ce qui n'est pas démontrable par l'analyse scientifique. Ainsi Humboldt : « Les artistes oubliaient trop facilement leur devoir : montrer ce qui existe. Ils voyaient dans l'écart une force, mais les fictions désorientaient les gens, la stylisation dénaturait le monde. Il en était ainsi des décors scéniques ne cherchant pas à dissimuler qu'ils étaient en carton, des tableaux anglais dont l'arrière plan baignait dans une sauce huileuse, des romans qui se perdaient en fabulations mensongères parce que leur auteur associait ses idées saugrenues aux noms de personnages historiques.
Répugnant, dit Gauss.
Humboldt ajouta qu'il travaillait à un catalogue regroupant les caractéristiques des plantes et de la nature, et auxquelles les peintres devraient être légalement obligés de se conformer. Il recommandait de faire la même chose pour l'écriture théâtrale. Il songeait à des listes recensant les traits de caractère des personnes importantes, et dont l'auteur n'aurait plus la liberté de s'éloigner. Si l'invention de M. Daguerre ( la photographie ) atteignait un jour à la perfection, les arts deviendraient de toute façon inutiles. »
Kehlmann, en écrivain du XXIè siècle en profite également pour, à travers les tribulations de ces deux illustres représentants de la nation allemande confrontés aux conséquences de la Révolution Française puis de l'invasion et l'occupation napoléonienne, pour dénoncer en les anticipant, les démons qui agiteront ce pays un siècle plus tard. Ainsi, Humboldt au Mexique, méditant sur les vestiges des temples aztèques : « Un tel degré de civilisation et une telle cruauté, dit Humboldt. Quelle association ! Tout le contraire, pour ainsi dire, de ce que représentait l'Allemagne. »

« Les Arpenteurs du Monde » de Daniel Kehlmann est un roman philosophique et érudit, un récit d'aventures et de réflexion, une incitation au voyage et à l'introspection qui oscille à chaque instant entre humour et gravité, une oeuvre tissée de paradoxes à l'image de la nature humaine.


jeudi 1 mars 2007

Pendaison de Crémaillère

Parfum de livres…parfum d’ailleurs

La littérature en toute liberté

Pendaison de crémaillère: Demain soir à partir de 23h Le forum Parfum de Livres...Parfum d'ailleurs fêtera sa naissance...Vous êtes chaleureusement invités à partager ce moment de convivialité et d'échanges. N’hésitez pas à inviter d'autres amis lecteurs à le découvrir à cette occasion.
Pour vous y rendre, cliquez ici.
Edouard Manet : "Le Bar aux Folies-Bergere"