Les souris déglinguées
"L'automate et son fils" Russell Hoban. Roman. Gallimard, 1987.
Traduit de l'anglais par Mimi Perrin.
Contrairement à ce que l'image ci-contre pourrait laisser croire, je n'ai pas lu ce livre en version anglaise. Il m'a été impossible de retrouver sur internet une reproduction de la couverture de l'édition française de ce roman paru chez Gallimard en 1987. Quant à photographier moi-même la couverture, j'y ai bien pensé, mais celle-ci étant en partie recouverte par le code-barre de la bibliothèque publique où j'ai emprunté cet ouvrage, j'ai du renoncer à cette solution. Finalement, j'ai donc opté pour la couverture anglaise qui retranscrit bien l'ambiance du roman.
« L'automate et son fils » de Russell Hoban est un roman d'aventures dont les deux personnages principaux sont deux jouets mécaniques : une souris et son fils. Vêtues de culottes de velours bleu, ces deux souris sont reliées par les bras et se font face afin d'exécuter un mouvement circulaire évoquant une ronde. Leur mécanisme se remonte à l'aide d'une clef placée dans le dos. Exposées dans un magasin de jouets mécaniques en compagnie d'une éléphante et d'une otarie mécanique, nos deux souris sont vendues à un client qui les destine à égayer et animer le pied du sapin de Noël familial.
Malheureusement, un accident domestique causé par le chat de la famille va endommager gravement le mécanisme des deux souris qui vont se retrouver à la poubelle. Récupérés et sommairement réparés par un clochard vagabond, les automates se retrouveront ensuite livrés à eux-mêmes et vont devoir affronter le vaste monde et ses périls.
La suite de leurs aventures ne va pas manquer de rebondissements. Ils vont d'abord tomber entre les griffes de Manny le rat, le maître incontesté de la décharge dans laquelle ils vont se retrouver obligés de travailler. Mais bien d'autres aventures et bien d'autres rencontres les attendent au cours de cette étonnante histoire dont on ne sait si elle appartient au genre du conte pour enfants ou à celui des fables philosophiques à l'usage des plus grands.
Ils vont ainsi tomber de Charybde en Scylla, échapper à des bataillons de musaraignes bellicistes, rencontrer un crapaud qui prédit l'avenir, une troupe de théâtre d'avant-garde composée de volatiles, une tortue philosophe et dramaturge à ses heures, un rat musqué physicien et encore bien d'autres personnages qui ne sont pas sans évoquer l'univers des dessins animés, « Le vent dans les saules » de Kenneth Grahame, ou les contes de Beatrix Potter.
Papa Souris et son fils Souriceau, automates doués miraculeusement de la vie et de la parole, nous rappelleront par certains aspects et aussi par leurs pérégrinations le « Pinocchio » de Carlo Collodi, devenu l'archétype du jouet devenu vivant et soumis à maintes épreuves pour échapper à sa condition.
On rit et on tremble à suivre les vicissitudes de nos deux souris égarées en pleine nature au cours d'un hiver glacial, incapables de se mouvoir si personne ne remonte la clef qui actionnera le mécanisme qui les mettra en mouvement. On assistera ainsi à leur quête de l'autoremontage, procédé mécanique miraculeux qui leur permettrait d'acquérir l'autonomie, ainsi que leur recherche éperdue de leurs anciennes compagnes, l'éléphante et l'otarie.
Conte moral et philosophique, « L'automate et son fils » est aussi et surtout un surprenant roman d'aventures qui fera méditer les grands et rêver les plus petits. De surprises en rebondissements, le lecteur va s'attacher à suivre les aventures palpitantes de ces deux souris de fer blanc confrontées à la cruelle réalité du monde extérieur mais dont la sagacité et la tendresse qu'elles éprouvent l'une envers l'autre les aideront à surmonter obstacles et périls de toutes sortes.
Parabole sur la liberté, la solidarité et l'entr'aide face à l'adversité, la différence et la tolérance, « L'automate et son fils » est un pur ravissement, une oeuvre faussement légère mais réellement profonde, un conte parfois cruel mais au bout du compte plein d'espoir, qui ravira toutes celles et tous ceux qui ont gardé profondément en eux l'étincelle de leur âme d'enfant.
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