Le Vertige de l'Ailleurs




"Qui comme Ulysse" Georges Flipo. Nouvelles. Editions Anne Carrière, 2008



Michel de Montaigne, dans ses Essais, écrit : « Je réponds ordinairement à ceux qui me demandent raison de mes voyages : Que je sais bien ce que je fuis, mais non pas ce que je cherche. »

Les personnages qui apparaissent au fil des quatorze nouvelles que nous propose Georges Flipo dans cet excellent recueil, ont tous plus ou moins quelque chose à fuir et à rechercher. Que leur voyage s'accomplisse dans des pays exotiques ou qu'il soit intérieur, leur démarche est toujours marquée du sceau de la fuite ou de la quête. On ne trouvera pas ici de descriptions pittoresques des pays traversés mais à plutôt le portrait de celui ou de celle qui voyage, pour diverses raisons : à la recherche d'une mémoire enfouie, d'une révélation intime ou plus prosaïquement dans le but d'éprouver cet étrange sentiment que l'on appelle dépaysement.

Nous ne sommes donc pas ici en présence d'un florilège de ces récits de voyages qui, de l'« Odyssée » d'Homère aux ouvrages de Nicolas Bouvier et Bruce Chatwin, ont fait rêver des générations de lecteurs.
Ici, le paysage, qu'il soit d'Afrique, d'Asie ou d'Amérique du sud, s'efface pour laisser la place à celui qui est en somme l'âme, l'acteur et le réceptable de toute pérégrination : le voyageur.
Ainsi, en quatorze tableaux, Georges Flipo nous brosse le portrait de personnages en quête d'un ailleurs : certains prennent l'avion en groupes, bardés d'appareils-photo, afin de contempler, à l'autre bout du monde, la misère de leurs contemporains.
D'autres, exilés, recherchent leurs racines et leurs souvenirs enfuis dans un pélerinage aux sources de leur existence.
D'autres encore, pélerins immobiles, recherchent en eux-mêmes cet ailleurs qui leur fait cruellement défaut et qu'ils tentent d'atteindre par l'entremise de leur mémoire, de leur imaginaire, ou encore à l'aide d'une recette de cuisine évoquant un passé riche de senteurs et d'émotions.

Voici donc quatorze portraits de voyageurs, quatorze nouvelles qui nous emmènent successivement de Bangkok à Buenos Aires, de Venise et de Quito au pied des tours de Mantes-la-Ville. Avec tendresse et humanité, Georges Flipo nous fait partager les émerveillements mais aussi les peurs, les angoisses et les nostalgies de toute une galerie de personnages confrontés au vertige de l'ailleurs.
Touchants, drôles, dramatiques, émouvants, les protagonistes de ces nouvelles ne sont pas de ces globe-trotters professionnels qui sillonnent la planète en tous sens. Ils sont des gens ordinaires, de ceux que l'on peut croiser à chaque carrefour. Ils sont un peu de nous-même, avec leurs doutes, leurs espérances et aussi leur maladresse. Tous ont entrepris un voyage, qu'il soit réel ou imaginaire (quelquefois aussi les deux), pour guérir une blessure, pour retrouver une part d'eux-mêmes, pour l'émulation du tourisme de masse ou encore pour échapper à un quotidien morose.
Tous vont vivre une expérience unique qui les marquera à jamais, que ce soit dans un hôtel de Pattaya ou sur les bords de la Dives à Cabourg.

C'est ému, amusé, intrigué, révolté aussi parfois, que le lecteur ressort de la lecture de « Qui comme Ulysse ». Il aura découvert, au cours de ces différents récits, les multiples facettes du voyage telles qu'elles se déclinent dans notre monde contemporain mais il aura aussi et surtout effectué un magnifique voyage dans le coeur des hommes, un voyage poétique et burlesque, parfois cruel, parfois émouvant jusqu'aux larmes, empreint de tendresse et d'une profonde humanité.

Je n'avais jusqu'ici jamais rien lu de Georges Flipo et je reste encore, quelques jours après avoir découvert ce recueil, tout émerveillé par le charme de ses nouvelles qui m'ont entraîné bien loin (et pas seulement en kilomètres) à la découverte d'horizons lointains mais surtout intimes.
Merci Monsieur Flipo pour ce beau voyage !


Les avis de Amanda Meyre, de Calou, de Cathulu, de Martine, de Cuné, de Keisha, de Fashion, de Kathel, de Laure, de Papillon... et j'en oublie.

Le blog de Georges Flipo, ICI.


Commentaires

Anonyme a dit…
J'admire cette excellente analyse, que ce recueil mérite bien.
Anonyme a dit…
iens de découvrir ton blog par hasard en cherchant " Walem Olum"...plein de choses passionnantes à découvrir chez toi !et un Xavier Deutsch que je n'ai pas lu...je te mets ici le lien pour la page d'accueil de mes blogs et je mets ton adresse sur mes pages ...
Anonyme a dit…
PS: j'y crois pas !!! t'es de Guingamp !! bon et bé moi la retraitée à Ploufragan pas loin !! le monde est petit!
BOUALI Pascal a dit…
Paisible: Effectivement, le monde est petit! Félicitations pour tes blogs que je vais mettre en lien.
Lyvie a dit…
et encore un enthousiaste à la lecture de ce livre dont on parle beaucoup sur les blogs, et en bien...
Il se trouve que j'ai choisi de lire "la Diablada" cet été, c'est aussi un excellent recueil de nouvelles, toutes différentes, et franchement, toutes réussies ;)
Anonyme a dit…
Je devrais le lire très bientôt ... enfin, j'espère !

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