"Heureux qui, comme Ulysse..."
La ville a aussi donné naissance ou hébergé des personnalités historiques comme Joseph-Guy Ropartz (1864-1955), compositeur et directeur du conservatoire de Nancy, son père Sigismond (1824-1878), écrivain, avocat et historien, ou encore Théodule Ribot (1839-1916), considéré comme le fondateur de la psychologie française et fondateur de La Revue Philosophique.
La ville est aussi connue pour son Festival de la St. Loup (danse bretonne) et aussi pour la promotion de la culture du camélia.
Mais il est un autre personnage illustre, natif de Guingamp, qui reste cependant peu connu du grand public ainsi que de beaucoup de guingampais.
M'étant établi depuis trois ans dans le quartier de Sainte-Croix, j'avais remarqué qu'une des rues portait le nom de Yann Conan.
Jean Conan (1765-1834) est donc né à Sainte-Croix, aujourd'hui quartier périphérique de Guingamp, mais autrefois bourg royal, quartier des tisserands établis le long des berges du Trieux. Les tisserands de Sainte-croix se sont spécialisés dans la confection de toiles de chanvre et de lin, mais surtout de « berlinge » tissu grossier à base de chanvre et de laine mêlé de poils de vache.
Notre-Dame de Bon-Secours, La Vierge Noire de la Basilique de Guingamp
L'iceberg dérive ainsi plusieurs jours sur l'océan, transportant dix-neuf hommes d'équipage et un canot avant que les rescapés ne puissent aborder le rivage de Terre-Neuve.
Là, il vivra quelques temps parmi les « sauvages » une population autochtone disparue depuis le début du XIXème siècle : les Béothucks, peuplade d'origine inconnue et ne faisant pas partie du type amérindien.
Jean Conan devra même résister aux assiduités d'une jeune « sauvagesse » qui a jeté son dévolu sur lui.
Après maintes péripéties, Jean Conan est affecté sur un autre navire : « La Concorde » où il participe à la saison de pêche avant de retourner sur Brest.
Le port de Brest au XVIIIème siècle (Peinture de Louis-Nicolas Von Blarenberghe)
Ayant réussi à se faire pardonner son acte de désertion par le capitaine de son régiment, Jean Conan revient à Sainte-Croix et à l'abbaye de Beauport. Il se marie le 24 janvier 1789 avec Marguerite-Jacquette Menguy dont il aura une fille, Renée, et un fils, Jean-Marie qui mourra en 1792.
L'année du mariage de Jean Conan, la révolution Française a éclaté et début 1792 il reprend du service dans le Régiment d'Anjou. De St. Brieuc il se rend à Paris où il participe à la prise des Tuileries. Il y assistera à l'arrestation de la famille royale, famille qu'en fervent républicain il décrit en des termes peu amènes :
« Nous fîmes halte devant les Tuileries. C'était la maison du roi.
Je vis jeter sur le pavé la vaisselle d'or et d'argent.
Je voyais Marie-Antoinette au balcon avec son petit garçon
Qui lui demandait : « Que signifie tout ceci, ma mère ?
Ce sont les Français, dit-elle, révoltés contre votre père.
Mais je me vengerai en lavant mes chaussures dans leur sang ».
Aussitôt nous vîmes le « gros papa Louis XVI »
Aller à la prison, conduit par de nombreux soldats. »
Un mois après ces évenements, il participe à la prise de Spire dans le Palatinat. Il prend ensuite part au siège de Mayence puis participe à la Campagne de Flandres, est blessé d'une balle dans la cuisse lors de la bataille de Wattignies. Il est réformé en 1794 suite à un accident survenu peu de temps après la bataille de Fleurus.
Soldats de l'An II
Revenu à Sainte-Croix, il se remarie en 1797, suite au décès de sa première épouse, avec Marie-Jeanne Le Thomet, fileuse, avec qui il aura quatre enfants.
Il obtient une entrevue avec le général Valtoux, à St. Brieuc, qui lui propose de le nommer sergent à la garnison de Guingamp. Jean Conan, en ardent républicain, accepte immédiatement et va alors devoir combattre les chouans, d'abord à St Brieuc puis aux alentours de St. Nicolas-du-Pélem et de Carnoët, à la chapelle de Malaunay puis au bois de Quélennec.
Les révoltés de Fouesnant (Peinture de Jules Girardet)
Puis en 1800 intervient le décret de pacification édicté par Bonaparte qui met fin aux hostilités entre royalistes et républicains.
Jean Conan se retire alors à Tredrez, au hameau de Kernevez où il reprend l'activité de tisserand. Il travaille toute la journée et, la nuit venue, à la lueur de la chandelle, il s'installe pour écrire.
Il rédige alors de nombreux écrits dont sept seulement nous sont connus. Trois d'entre eux n'ont toujours pas été retrouvés, il s'agit de « Jérusalem délivrée », « L'écriture sainte » et « Ann tad Boucher »
Nous sont parvenus la « Vie de Louis Eunius »(Vie de Saint-Patrice), « La inosans reconnu a Santes Jenovefa »(Vie de Ste Geneviève), « Ar vue a Sant ar Voan »(Vie de saint-Yves), ainsi que, bien évidemment, les « Avanturio ar citoien Jean Conan a Voengamp »
Cette autobiographie rédigée en breton et en vers (7054 exactement) est non seulement un récit d'aventures comme le titre le laisse deviner mais aussi une confession que Jean Conan, sentant approcher la vieillesse et la mort, se doit de rédiger afin de se faire pardonner les errements de sa vie passée.
Car notre homme, malgré sa ferveur chrétienne et sa dévotion à Notre-dame de Bon-Secours, n'en fut pas moins un grand pécheur et c'est sans dissimulation qu'il raconte avoir, lors des campagnes qu'il a menées, détroussé les morts et les vivants et avoir tué de sang-froid quelques-uns de ses semblables. La violence est omniprésente dans ce récit, violence des rapports humains, violence de l'époque, violence de la soldatesque livrée à elle-même sur des populations conquises. Jean Conan ne dissimule pas ses crimes lorsqu'il relate ses campagnes militaires, il les couche sur le papier pour les exorciser et s'en explique dès les premières lignes de son manuscrit :
« [...]Je n'ai eu aucun plaisir à écrire mon histoire ;
Et même, quelquefois, l'émotion me faisait reculer.
Mon coeur se glaçait, mon esprit se troublait
Quand je relatais les dangers, les peines et les horreurs.
Plaise à dieu qu'il n'arrive à personne de faire
Les rencontres désagréables que j'ai faites ! »
Quant aux dernières phrases de son autobiographie, c'est au lecteur qu'il s'adresse :
« Voici longtemps que je pensais résumer
Et consigner sur le papier la suite de ma vie.
Si j'avais été riche, instruit, et doué pour la parole,
Même à grand prix d'argent, cette histoire serait recherchée.
Mais le fait d'être un pauvre homme ne me tracasse pas.
Après moi, mon nom me survivra sur le papier.
Quelqu'un, peut-être un jour, après avoir lu ce cahier
Dira : « Que Dieu pardonne à celui qui l'a écrit ! »
Le salaire que je réclame, lecteur, n'est pas considérable.
Une simple parole suffira à me payer.
Dis un « pater » pour moi et si tu trouves que je demande trop,
Demande au moins à Dieu de pardonner à l'âme
Du pauvre Conan. Sa vie a été pleine de tribulations,
Mais cela en valait la peine. »
Loin d'être une lecture fastidieuse, « Les aventures de Jean Conan » est un récit qui se lit avec aisance, un témoignage précieux, parfois inexact sur les dates (il faut pardonner à l'auteur certaines approximations dues aux défaillances de sa mémoire), parfois teinté de vantardise (il raconte avoir tué huit cents hommes en quatre coups de canon) mais toutefois d'une profonde sincerité. Puisse le souvenir de jean Conan se perpétrer longtemps encore à Guingamp et dans ses environs.
Kenavo Citoien Yann Conan a Voengamp !
Commentaires
J’ai imaginé un minuscule et modeste questionnaire aux allures de « bibliothèque anthologique » . Vous pouvez y répondre et (ou) le proposer à vos amis.
Faites un « copier coller » puis envoyez-le moi à :
coqalane@wanadoo.fr ou http://blog.france3.fr/cabinet-de-curiosites
Je serais heureux de vous lire et de vous présenter sur mon blog, Le Cabinet de Curiosités de Eric Poindron, (http://blog.france3.fr/cabinet-de-curiosites) avec votre autorisation.
1 – Qu’est-ce qu’un livre ?
2 – À quoi sert un livre ?
3 – Quel est le livre qui vous à la plus marqué (vous pouvez expliquer pourquoi) ?
4 – Quel est le livre que vous préférez (vous pouvez en citer plusieurs) ?
5 – Quel est le livre qui vous à le plus dérangé (en bien, en mal, qu’importe) ?
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7 – Quel est le livre que vous n’avez jamais lu et qu vus vous êtes promis de lire (vous pouvez en citez plusieurs) ?
8 – Quel est le livre que vous souhaiteriez faire découvrir (à un ami, au public) ou éditer si vous étiez éditeur ?
9 – Quel est le livre que vous ne lirez jamais (vous pouvez en citer plusieurs) ?
10 – Quel est le livre le plus « illisible » que vous ayez lu (vous pouvez en citer plusieurs) ?
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14 – Quel est le livre dont vous connaissez des phrases ou des passages par cœur (vous pouvez en citer plusieurs) ?
15 – quel est le livre dont… Vous pouvez continuer la question… et y répondre.
Merci de m’envoyer vos réponses que je présenterai sur le cabinet de curiosités, avec votre accord, et à LA REVUE DES RESSOURCES afin d’imaginer, avec vous, une bibliothèque hétéroclite et rare.
En souhaitant que chacun découvre de nouveaux livres, ou des compagnons de même lecture…
Merci de joindre une présentation courte de votre personne.
Avec mes amitiés.
Votre serviteur, Éric Poindron.