Atelier Couture









"Le temps d'une chute" Claire Wolniewicz. Roman. Editions Viviane Hamy, 2008.




Il est un fait convenu de penser que lorsque une personne est confrontée à une mort violente, sa vie défile dans sa mémoire lors de ses tous derniers instants. Cette dilatation de la mémoire et du temps permettrait de revoir défiler le film de toute une vie en l'espace de quelques secondes avant que la conscience ne s'éteigne à tout jamais.
C'est ce qui arrive à Madelaine Delisle, soixante dix-huit ans, au moment où elle tombe de son balcon situé au quatrième étage de son bel appartement parisien. Pendant ce bref instant qu'est le temps d'une chute, elle va se remémorer l'histoire de toute une vie, une vie dédiée à l'univers de la mode féminine, une vie au cours de laquelle défileront également les grands et les petits faits de l'Histoire du XXème siècle.
C'est l'enfance, tout d'abord, au cours des années 20, une enfance misérable dans un endroit reculé du Limousin, entre une mère aigrie par les absences et les infidélités du père, et une fratrie d'enfants malades et attardés. Puis c'est l'orphelinat, suite au décès de sa mère, son placement chez les religieuses où elle va faire l'apprentissage de ce qui va devenir la passion de toute sa vie : la couture.
À sa sortie de l'orphelinat, elle est placée par les soeurs chez une couturière de Limoges où elle va faire ses premiers pas dans la création de vêtements. Remarquée par une célèbre actrice en villégiature, elle va, sur les conseils de celle-ci, « monter » à la capitale où elle va intégrer l'atelier de Mme Germaine, couturière attitrée de l'actrice et du « Tout-Paris ». Dans cet atelier, ruche bourdonnante régentée par la patronne, Madelaine va donner libre cours à sa créativité sous le regard critique de Mme germaine et les encouragements du mari de celle-ci, Monsieur Georges, un ancien combattant de 14-18 traumatisé par les horreurs de la guerre.
De la guerre, il va très rapidement en être question, en cette fin des années 30, alors que l'Allemagne nazie envahit la Pologne. Puis c'est l'Occupation, les restrictions et la peur au quotidien.

Vient ensuite l'époque de la Libération, Madelaine fait la rencondre de celui qui va devenir son compagnon, Tadeusz, un rescapé des Camps de la Mort.
De cette union tendre et cependant orageuse naîtra une fille, Lucie, avec qui Madelaine entretiendra des relations conflictuelles et douloureuses face à cette enfant qui reproche à sa mère d'être si peu présente.
Car désormais Madelaine est devenue responsable de l'atelier de la Rue des Martyrs – Mme Germaine, sentant le poids des années, lui a cédé sa place – et le travail, entre la gestion de l'atelier, des collections, les invitations mondaines et les rendez-vous professionnels lui prennent tout son temps et requièrent toute son énergie.
Ainsi, entre petits bonheurs et crises de découragement, entre illusions et déceptions, la vie de Madelaine va s'écouler, rythmée par les évenements du siècle, la guerre, Mai 68 et la libération des moeurs, mais aussi l'évolution de la mode féminine, du corset à la mini-jupe, relatant tout un pan de l'histoire contemporaine au travers du regard d'une femme témoin et actrice de son époque.

Voici un roman qui – s'il ne m'avait pas été adressé dans le cadre du Prix Landerneau – n'aurait sûrement pas retenu mon attention. Le monde de la mode et de la haute-couture me laisse relativement indifférent et j'avoue que si j'avais eu à remarquer ce roman sur l'étalage d'une librairie, je l'aurais certainement reposé afin de choisir un autre ouvrage.
Pourtant, puisque j'ai pris l'engagement de lire tous les livres de la sélection (ce qui est chose faite, même si je ne les ai pas encore tous chroniqués sur ce blog), j'ai surmonté mes a-priori de départ et me suis lancé dans cette lecture.
Et j'ai été, je dois le dire, agréablement surpris puisque ce roman ne m'est pas tombé des mains au bout des vingt premières pages. J'ai donc lu ce livre de bout en bout, sans ennui (mais sans passion non plus), suivant au fil des pages le destin de Madelaine dans sa traversée du siècle.

L'écriture conventionnelle de Claire Wolniewicz fait de ce roman un agréable moment de lecture (idéal pour une lecture sur la plage) sans pour autant laisser au lecteur une impression autre que celle d'un récit plaisant et divertissant mais qui sera rapidement oublié comme tant d'autres romans qui ne sont ni des chefs-d-oeuvre ni des abominations (ce n'est quand même pas du Guillaume Musso!).
Bref, « Le temps d'une chute » est un agréable roman, sans plus, un récit qui aurait gagné à être un peu plus fouillé au niveau du contexte historique (on est loin de la « fresque du XXème siècle » vantée sur la quatrième de couverture) et qui aurait, ce me semble, mérité plus d'épaisseur quant à la psychologie des personnages ainsi qu'aux évenements que ceux-ci sont amenés à traverser.

L'avis de Cathulu, de Fashion, de Papillon et d'Emma.




Commentaires

Michel a dit…
En résumé c'est insipidement beau
BOUALI Pascal a dit…
Michel : c'est une remarquable synthèse que la tienne !
Anonyme a dit…
Ke vais quand même tenter ma chance! L'insipdement beau sur une plage peut être fort agréable! ;-)

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